Dans un livre d'entretien paru post mortem, Darc raconte que pendant la guerre, sa mère Marie-Rose Matron (1924-2013), traductrice, était amoureuse d'un Allemand mais à la Libération, elle est condamnée à mort pour intelligence avec l'ennemi ; graciée, elle épouse Abraham dit Albert Rozoum, qui sombrera plus tard dans l'alcoolisme[9],[8].
Daniel Darc est le cousin d'Hervé Rozoum, guitariste, compositeur et producteur qui vit à Berlin.
Sa mère dit de son fils Daniel qu'il était un enfant timide et obéissant. Vers ses quatre ou cinq ans, après avoir vu Johnny Hallyday à la télévision, il avait fallu lui acheter une guitare puis un tourne-disques où il écoutait Elvis Presley ; la musique était devenue son obsession[3]. La révélation de Presley se fait devant les magasins Tati à Barbès, où son père lui offre King Creole et Crawfish qui ont changé sa vie, dit-il[7].
Taxi Girl connaît le succès, notamment avec le singleCherchez le garçon, édité en 1980, dont les ventes atteignent les 150 000 exemplaires[13],[14]. Leur unique album, Seppuku, est produit par le bassiste des StranglersJean-Jacques Burnel, et édité en 1981 par Mankin, dans lequel Daniel Darc s’invente un double, Viviane Vog, pour signer une partie de ses textes plutôt morbides[5],[14]. Après la fin de Taxi Girl en 1986 – marquée par le décès à 21 ans par overdose de cocaïne du batteur, Pierre Wolfsohn, en , et l'abandon des deux autres membres –, Daniel Darc poursuit une carrière en solo[13].
Sur son premier album solo, Sous influence divine, sorti en 1987, il est épaulé par Jacno, qui avait accepté de travailler avec lui sur la base d’un single, mais qui réalise l’album entier. Sur ce disque qui sonne musicalement beaucoup comme du Jacno, Daniel Darc conserve l’écriture simple et immédiate qui est sa marque de fabrique depuis l’époque Taxi Girl. Au milieu de cet album assez policé, on relève la présence d'un titre très rock’n’roll (Le Seul garçon sur Terre) et d’une reprise de Comment te dire adieu, écrit à l'origine par Serge Gainsbourg pour Françoise Hardy.
En 1988, après sa rencontre avec Bill Pritchard (ils partagent alors le même label, Play It Again, Sam), ils enregistrent en sept jours l'album-conceptParce que traitant de l'ambivalence humaine. Il comporte une reprise de Charles Aznavour (donnant son titre à l'album) et une adaptation du Velvet Underground (Stephanie Says(en)). Édité à 3 000 exemplaires, cet album salué par la critique, scellera des liens indéfectibles entre les deux artistes qui vivront même un temps ensemble à Paris. Toujours en 1988, Daniel Darc enregistre La Ville, single produit par Étienne Daho qui ne sera pas suivi d'un projet d'album, comme cela avait été le cas avec Jacno. Le chanteur se débat alors avec ses addictions dont celles à l'héroïne (qui inhiberait sa timidité maladive et sa phobie sociale) et l'alcool[12],[15].
Daniel Darc joue son propre rôle dans quelques films tels Les Enfants de la Blank ou Garçon sauvage de Marc Dufaud.
L'album Nijinsky est édité en 1994 par le label indépendantBondage Records. Accompagné par le guitariste Georges Betzounis, Daniel Darc semble avoir eu, plus que par le passé, la possibilité d'imposer une orientation musicale proche de ses goûts fondamentaux (rock new-yorkais, littérature du mal, jazz...). Les Pure Sins l'accompagnent dans la tournée censée promouvoir le disque, mais l'absence de succès commercial, conjugué à des problèmes envahissants d'addictions diverses, une réputation de junk punk et un passage en prison, met la carrière du chanteur entre parenthèses pour quelques années.
Le , il est invité sur scène par Dominique A à Paris dans le 13e arrondissement lors d'une semaine de duos offerte au chanteur sur invitation, à laquelle participeront également Silvain Vanot et Katerine. Il chante quelques titres en fin de concert en sa compagnie.
En 1997, il coécrit et enregistre le titre Et si nous n'avions pas été là l'histoire aurait été la même mais racontée par d'autres avec le groupe toulousain Diabologum, à l'occasion du disque collectif Comme un seul homme.
L'année 2004 marque son retour au premier plan grâce à un nouvel album en talk over , Crèvecœur, conçu en tandem avec Frédéric Lo qu'il a rencontré l'année précédente dans la rue Charles-Delescluze à Paris[16]. Le disque, qui évoque des histoires d’amour, de rédemption et d’amitié, est bien reçu par la critique et se vend à 60 000 exemplaires[14]. Il est récompensé aux Victoires de la musique dans la catégorie « album révélation de l'année »[17].
Darc participe ensuite à diverses productions avec Nosfell, Cali, Buzy, Tchéky Karyo, Élisa Tovati, Thierry Amiel ou Alizée. En , la chaîne de télévision Arte diffuse un film d'une heure dans lequel cinq titres de Daniel Darc sont illustrés en images. Réalisé par Paul Ouazan, il est diffusé dans le cadre du magazine La Nuit / Die Nacht[18].
L'album Amours suprêmes, toujours arrangé et réalisé par Frédéric Lo, sort en . Son titre fait référence à A Love Supreme, un album de John Coltrane dont Daniel Darc a fait l'un de ses disques de chevet. Alain Bashung, Robert Wyatt, Morgane Imbeaud (chanteuse de Cocoon) et Steve Nieve y font des apparitions. Le premier single s’intitule J’irai au paradis[14],[19].
Il se produit en concert à l'Olympia en , aussi au Cabaret sauvage en septembre 2009 dans le cadre du festival Jazz à la Villette, ainsi qu'au Théâtre du Palace en pour un spectacle intitulé « Il sera une fois »[14].
Sur l'album La Taille de mon âme, édité en 2011 par Sony Music, Darc travaille avec le musicien Laurent Marimbert que lui a présenté le chanteur Christophe[20]. Le disque récitatif contient des extraits sonores du film Les Enfants du paradis de Marcel Carné[5],[21]. Les ventes de l'album, dont est extrait le single C'est moi le printemps, atteignent les 100 000 exemplaires[22].
En 2013, Daniel Darc commence à travailler sur son autobiographie avec le journaliste Bertrand Dicale ; abandonné après la mort soudaine de Darc, ce projet se transformera cependant en un livre d'entretiens entre Daniel Darc et Dicale, rédigé à la première personne et intitulé Tout est permis mais tout n'est pas utile (phrase de l'apôtre Paul de Tarse), publié post mortem chez Fayard. Il a également l'intention de réaliser un opus sur ses tatouages, avec la complicité de Chamor de Tribal Act pour les photographies, et qui doit s'intituler Darc Tattoo[23]. Il prépare aussi un nouvel album en compagnie de Manou, compositeur attitré de la chanteuse Berry. Il travaille par ailleurs sur son prochain album depuis plusieurs mois avec le compositeur/réalisateur de La Taille de mon âme, Laurent Marimbert. Il se produit en public pour la dernière fois le sur la scène de la Gaîté Lyrique, aux côtés de Bertrand Burgalat[24]. Daniel Darc se trouvait ainsi dans une période de sa vie active et créatrice.
Il est retrouvé sans vie par son producteur dans son appartement du 11e arrondissement de Paris, le [12]. Un mélange d'alcool et de médicaments pourrait être à l'origine de sa mort à 53 ans[17]. On apprend plus tard dans Tout est permis mais tout n'est pas utile qu'un œdème pulmonaire est la cause du décès[25]. On y apprend également que Darc avait exprimé son désir désormais de vivre vieux[8]. « Je suis trop vieux ou trop jeune pour mourir... j'ai envie de vivre... Je suis amoureux, je tourne, je fais des disques et je prépare le prochain album... », confie-t-il quelques mois auparavant lors d'une interview[7].
Le chanteur de Taxi Girl a toujours été inclassable dans la scène rock française dont il était l’une des figures marquantes. Très influencé par l’explosion punk, les Sex Pistols, et Kraftwerk, c’était d'abord un faux dandy à la voix fragile et traînante que l'on dit « blanche », inspiré par Berlin[38] et le Japon, qui s’habillait en rocker et qui poussa l’autodestruction jusqu’à se taillader les veines pour asperger le public lors d’un concert au Palace, en première partie de Talking Heads, en , pour faire réagir le public parisien[24]. Il se fit tatouer les avant-bras pour immortaliser l’événement.
Les textes de Daniel Darc portent la marque de son style d'où la poésie n'est jamais absente. Voulant rompre avec près de vingt années d'excès divers - alors qu'adolescent, il voulait devenir rabbin -, il se convertit au protestantisme en 1997 puis se fait tatouer une croix vide sur la poitrine qui deviendra un sacré-coeur[24],[39]. L'influence de la religion se fait sentir avec des références visuelles, un penchant assez christique qu'il assume, des lectures de psaumes en musique sur scène par exemple (le psaume 23 est mis en musique) ; il y fera même référence lors d'interviews[40],[41],[12],[42].
Hommages
Pour marquer son anniversaire, plus d'un an après sa disparition, un hommage intitulé « C'est toi le printemps » est rendu à Daniel Darc le à l'initiative de l'association « Je me souviens, je me rappelle »[43]. Plusieurs artistes sont là Buzy, Frédéric Lo, Berry, Dani, Zouzou, Manu, Marc Minelli[44] se produisent bénévolement en concert au Jane Club à Paris[45]. Bill Pritchard a lui aussi répondu présent :
« J’ai donné mon accord pour faire un concert hommage à Daniel Darc le 24 mai à Paris où je jouerai quelques-unes de mes chansons favorites de son répertoire dont au moins une de Parce que, un album que nous avons fait ensemble il y a très très longtemps[46]. »
Un hommage discographique voit le jour à l'initiative du label Unknown Pleasures Records distribué par La Baleine : un CD et un 45 tours vinylecollector est disponible en . Avec d'anciens membres d'Indochine, de Complot Bronswick, Les Tétines Noires, Norma Loy ou End Of Data, un hommage à Daniel est rendu, plus électronique. En , quelques-uns de ces groupes participant au « Tribute To Daniel Darc & Taxi Girl » jouent en concert des reprises de Taxi Girl lors de la première soirée anniversaire de la mort de Daniel Darc, au Point Éphémère.
Le en soirée, un nouvel hommage lui est rendu dans A'live, l'émission de Pascale Clark sur France Inter, avec notamment les chanteuses Dani et Berry, Frédéric Lo, à l'occasion de la réédition de Crèvecœur augmentée de 11 chansons inédites. Le rappeur Abd al Malik sort le titre Daniel Darc sur son album Scarifications (2015). En 2018, l'actrice Lou Gala interprète sa version de la chanson Haute surveillance, tirée de l'album Nijinski.
2006 : Écriture d'un texte sur Ce lien qui nous unit de Tchéky Karyo
2006 : Écriture du texte du single Cœur Sacré pour Thierry Amiel
2006 : Écriture du texte Ça ne sert à rien d'aimer, pour l'album Je ne mâche pas mes mots d'Elisa Tovati
2006 : Juif est Dieu et Requiem pour un con, trio avec Rodolphe Burger et Jacques Higelin, sur l'album Hommage à Serge Gainsbourg de Rodolphe Burger et Meteor Band (concert donné dans le cadre du 6e Festival C’est dans la Vallée au Temple Réformé de Sainte-Marie-aux-Mines)
La plupart des écrits (poèmes, traductions) de Daniel Darc sont publiés aux éditions Derrière la salle de bains[50] par Marie-Laure Dagoit (sauf indication autre) :
Énergie dramatique de la rue (collection « Cahiers de nuit », 1994)
Daniel Darc et Philippe Liotard, « “Darc Tattoo”, un corps marqué du rock : dialogue avec Daniel Darc », Corps, no 13, 2015 (« Le Corps du Rock »), p. 57-64
Emmanuel Abela (dir.), Bruno Chibane (dir.) et al. (ouvrage collectif), Le Saut de l'ange : hommage à Daniel Darc, Mulhouse, Médiapop Éditions, coll. « Sublime » (no 10), , 272 p., broché, 12 x 18 cm (ISBN978-2-918932-27-7, présentation en ligne)