Mathilde Bellaud-Dessalles, L’anneau de Saint Guiraud dans Livre:Bellaud-Dessalles - Légendes du vieux Béziers, 1923.pdf 1923
L’anneau de Saint Guiraud
ui n’a admiré, en suivant la route d’Agde à
Saint-Pons-de-Thomières, les bâtiments
magnifiques de ce qui fut, avant la Révolution
française, le Prieuré Royal de Sainte-Marie-de-Cassan ?
Château bien plus que monastère, sa façade
présente majestueusement au couchant ses hautes fenêtres, du même nombre, dit-on, que les jours de l’année, encadrées par les pures lignes de ce dix-huitième siècle, où en art, du moins, tout fut charmant !… Seule l’église romane parle d’un passé qui fut austère !
Il fut glorieux aussi.
Son nom vient, dit-on, du mot celtique : chêne,
sa fondation se perd dans les brumes des temps anciens. Au onzième siècle, son histoire s’éclaire par la donation qu’en font à des Religieux Augustins, les seigneurs de Margon, et il devient une terre de miracles !
Les moines marchent pieds nus, ils se nourrissent,
à certains jours, de pain d’orge et d’eau pure ; ils n’en sont pas moins réduits à une telle pauvreté, qu’ils vont se disperser pour aller tendre la main. Avant de se séparer, ils se rendent à la chapelle et y récitent le Salve Regina : la prière n’est pas achevée, que les greniers regorgent de blé, que les cuves débordent de vin…
Puis s’ouvre l’ère de la prospérité : les vicomtes
de Béziers adoptent Cassan pour leur nécropole, les dons affluent… la table d’or massif du comte Roger est célèbre !…
Les richesses spirituelles n’y sont pas moins
nombreuses ; on voit dans les reliquaires un morceau de la Vraie Croix, des fragments de la Couronne d’épines, une pierre du Saint-Sépulcre, des ossements de Saint Jean-Baptiste, de Sainte Irénée, de Saint Majan, et cette main patricienne de Sainte Marthe, qui a servi Jésus à Béthanie, qui, peut-être, a aidé à rouler la pierre du tombeau de Lazare !
Le treizième siècle, naturellement, bouleversa
tout à Cassan, et, comme suite à la Croisade, l’Abbaye passa fief royal, sous la redevance noble d’une paire d’éperons d’or !… Mais tout ceci n’est plus de la légende…
Ce que nous voulons chercher à Cassan, c’est
la douce figure de Celui qui en fut la plus pure gloire : Saint Guiraud de Puissalicon.
Son histoire est courte et se résume dans la
parole de l’Évangile : « Il passa en faisant le bien ». Il avait, dit la tradition, grandi dans le monastère, ayant pris le froc, il fut appelé par ses pairs à le gouverner. Par ses soins les bâtiments furent reconstruits, un hospice pour les voyageurs et les pauvres édifié ; le renom de ses vertus s’étendait au loin.