L'Anjou en tant qu'entité et territoire apparaît sous l'Antiquité avec le peuple des Andécaves. Leur territoire, centré sur Angers (alors Andegavum), correspond en partie aux limites du futur Maine-et-Loire. Occupé par les Romains, il se trouve plus tard au centre de plusieurs influences et rivalités, notamment entre les Francs et les Bretons. Devenu comté, il devient le cœur de l'Empire Plantagenêt, ou « empire angevin » au XIIIe siècle. L'Anjou garde son indépendance face au pouvoir royal jusqu'en 1259, date du traité de Paris, qui le rattache à la couronne de France. Donné en apanage à la mort de Louis VIII de France, il est érigé en duché en 1360 puis définitivement rattaché au royaume de France en 1481.
Le nom de la province provient du déterminantAndecavorum qui fait référence au peuple gaulois des Andecavii (Andécaves ou Andégaves), dont la cité était, sous l'Empire romain, Juliomagus[5].
L'appellation actuelle de la province est issue de l'élément Andecavorum. La ville d'Angers est mentionnée au Moyen Âge sous les formes Andecava civitas au VIe siècle et Andecavis en 769[6], Andegavis entre 861 et 882, Angieus en 1127, Angeus en 1205. On trouve une forme Angiers dès le XIIe siècle[7].
L'évolution phonétique Andecavis en Angeus[8] est régulière et s'explique par la lénition des consonnes intervocaliques. Le -s final est celui de l'ablatif-locatiflatin. La variante Andecavum explique le nom d'Anjou (in Andecavo en 797). Celui d'angevin est un dérivé semi-savant. Le doubletAngers, Anjou est tout à fait comparable à celui de Poitiers, Poitou[9].
Blason moderne de l'Anjou.Les armes de la 1re maison d’Anjou attestées depuis Geoffroy V Plantagenêt mais peut-être antérieures.
Si les armoiries des Ingelgeriens ne sont pas connues, on suppose que les armes de la première maison d'Anjou étaient d'azur, au chef de gueules, aux rais d'escarbouble d'or, brochants sur le tout. Mais cela tient plus du mythe, car les armes n'avaient, à cette époque, pas encore de caractère héréditaire attaché au nom et surtout, elles n'apparaissent pas avant la seconde moitié du XIe siècle. Ce sont donc probablement les Plantagenêts, avec Geoffroy Plantagenêt, qui ont été les premiers à en porter : d'azur, à six lions d'or posés 3, 2 et 1.
Après les Plantagenêts, les deux maisons d'Anjou françaises qui se sont succédé entre 1246 et 1480 portèrent à partir de 1270 un semé de fleurs de lys à la bordure de gueules. Le roi Charles V remplaça le semé des armes de France par trois fleurs et en 1480, son descendant Louis XI, réunit définitivement l'Anjou à la Couronne.
Géographie
Délimitations historiques
Au XVIIIe siècle, le territoire angevin est constitué de deux entités séparées par la Loire.
À l'origine, le territoire angevin se trouvait centré sur le pagus d'Angers. Le comté d'Anjou comprenait Saumur à l'est, arrivait jusqu'au confins du Maine avec Le Lude, possédait une partie de la vallée de la Sarthe et de la Mayenne. La domination angevine comprend également une partie des Mauges, tandis qu'à l'ouest, la frontière reste floue avec la Bretagne, et au sud avec l'Aquitaine[11].
Foulques III d'Anjou fait fructifier le domaine de son père, et l'étend à l'est en reprenant définitivement Saumur par les armes en 1026, et en mettant la main sur les Mauges par des manœuvres politiques. On lui doit plus d'une centaine de châteaux, donjons et abbayes, dont les châteaux de Montsoreau, Montrésor, Montbazon, Langeais… En 1007, Foulques Nerra fonde l'abbaye de Beaulieu-lès-Loches.
Carte topographique de la province d'Anjou avec le département de Maine-et-Loire dans ses limites jusqu’en 2016.
Carte topographique de la province d'Anjou avec les sénéchaussées en 1789.
Carte de la province d'Anjou indiquant les sénéchaussées en 1789.
L'Anjou se divise traditionnellement en quatre régions naturelles : le Baugeois, le Haut-Anjou (ou le Segréen), les Mauges et le Saumurois. D’autres découpages en cinq régions naturelles existent reprenant les quatre précédentes à laquelle se rajoute une cinquième région plus petite centrée sur Angers ou suivant la vallée de la Loire de part en part du département[12].
Le Baugeois occupe la partie orientale de Maine-et-Loire, s'étendant sur sa partie nord-est. Ce territoire est délimité au sud par la vallée de l'Authion et celle de la Loire, et à l'ouest par la vallée de la Sarthe[13],[14]. Son relief est principalement constitué d'un plateau, aux terrains sablonneux, siliceux ou calcaires[14]. C'est la région la plus boisée du département, qui abrite l'essentiel des forêts de Maine-et-Loire. Ses particularismes architecturaux incluent de nombreuses églises romanes ainsi qu'un certain nombre de clochers tors.
Le Haut-Anjou occupe la partie nord du département de Maine-et-Loire et le tiers sud du département voisin de la Mayenne, dite Mayenne angevine. Il couvre les régions situées en amont des rivières Mayenne et Sarthe ainsi que leurs affluents, en faisant la région la plus drainée du département. Son relief armoricain en fait une région de crêtes et de vallées peu élevées, dont le sous-sol est constitué de schistes et de grès formant les principales matières premières de son architecture. Paysage de bocage, son histoire est lié à la chouannerie et à l’exploitation ardoisière.
Les Mauges correspondent au sud-ouest du département. C'est un pays de bocage sur des terrains anciens, composés de schistes et de granites, et sillonné de vallées encaissées, en particulier celles de l'Èvre et de la Sèvre Nantaise. Son relief plus marqué y provoque une accentuation des précipitations par rapport au reste du département[15]. Les mémoires et le patrimoine local des Mauges ont été marqués par le soulèvement vendéen et la répression qui s'est ensuivie, à partir de 1793.
Enfin, le Saumurois s'étend au sud-est du département. Situé à l'extrémité sud-ouest du Bassin parisien, il se constitue en un vaste plateau aux sols à dominante calcaire. Incluse dans le val de Loire, le fleuve creuse dans le plateau de nombreuses corniches et falaises de tuffeau et de calcaire qui ont été percés de nombreux habitats troglodytes. Le climat y est plus continental, les nuages ayant perdu une partie de leur humidité et donnant moins de précipitations sur cette partie du département[14]. Cette particularité climatique et géologique permet le développement de nombreuses pépinières (roseraies de Doué-la-Fontaine) ainsi que d'un des plus vastes vignobles du val de Loire (appellations saumur-champigny, saumur, coteaux-du-layon).
La région se divise également en deux zones géologiques selon les roches emblématiques qui constituent leur identité minérale[16] : l'Anjou noir ou bleu à l'ouest (Anjou occidental, avec ses toits d'ardoises, ses maisons de schiste et son bocage, reposant sur des formations de schiste ardoisier du Massif armoricain), par opposition à l'Anjou blanc (Anjou oriental, avec ses maisons de pierres blanches et ses habitations troglodytiques, constitué de terres blanches provenant du tuffeau et des faluns du Bassin parisien)[17].
Au XVIe siècle, sous le règne d’Henri II, se mettent en place dix-sept recettes générales confiées à des trésoriers généraux (édit donné à Blois en janvier 1551) et 21 généralités ou pays d'élections.
Bailliage de Touraine : 616 paroisses. 74 177 feux.
Au XVIIIe siècle, l'étendue de la généralité de Tours nécessite le règlement pris par arrêté du Conseil du qui permet la formation de trois assemblées au sein de cette importante généralité : Anjou, Maine et Touraine. Ces trois assemblées recouvrent sensiblement les limites des anciennes provinces royales. Néanmoins certaines circonscriptions ne coïncident pas avec celles des généralités, car les limites paroissiales et de pays évoluent au fil du temps. Ces trois assemblées se réunissent en août 1787 puis en .
Juridictions
L’Anjou est divisé en sénéchaussées qui sont des tribunaux de première instance relevant du Parlement de Paris et composés d’un lieutenant-civil, d’un lieutenant-criminel, d’un lieutenant de police, de conseillers, d’un procureur, d’un avocat du roi, et d’un substitut.
En 1551, pour venir en aide aux tribunaux des sénéchaux, le roi de France Henri II institue des tribunaux auxiliaires que l’on appela présidiaux. Ils se prononcent en dernier ressort, sur l’appel des tribunaux des sénéchaussées, pour les sentences qui n’excèdent pas deux mille livres tournois, et jugent certains délits déterminés. Un présidial est établi à Angers dès 1552. C’est le premier corps judiciaire de l’Anjou. Le présidial disparaît en 1790 lors de la Révolution française.
↑Paul Wagret, Visages de l'Anjou, Éditions des Horizons de France, , p. 9
↑La limite géologique entre les deux zones s'établit approximativement sur une ligne de contact nord-sud à la hauteur d'Angers. Cette limite n'est pas marquée au niveau de la topographie et n'est pas suivie partout par les différents paysages végétaux.
Voir aussi
Bibliographie
André Bendjebbar, La vie quotidienne en Anjou au XVIIIe siècle, Hachette, Paris, 1983, 288 pages.
Laurent Bourquin, Les mutations du peuplement nobiliaire angevin à l’époque moderne, Histoire Économie et Société, 17e année, no 2, 2e trimestre 1998, S.E.D.E.S., Paris, p. 241 à 259.
François Dornic, Histoire de l’Anjou, Presses universitaires de France, coll. « Que sais-je ? » no 934, Paris, première édition 1961 ; deuxième édition mise à jour 1971, 127 p.
Robert Favreau :
en collaboration avec Marais Jean-Luc et alii, Anjou, Éditions Bonneton, Paris, seconde édition entièrement revue, mise à jour et augmentée 1992, 399 p.
Société Monumenta Historiæ Galliarum, Robert Favreau (dir.), Atlas historique français, le territoire de la France et de quelques pays voisins, Anjou, en deux volumes, Institut géographique national, Paris, 1973, 171 p. et 49 planches.
Xavier Ferrieu, Un gentilhomme angevin du siècle des Lumières, Auguste-Claude-François de Goddes, marquis de Varennes (1715-1782), Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest (Anjou, Maine, Touraine), tome 83, année 1976, no 1, p. 93-109.
Gontard de Launay, Recherches généalogiques et historiques sur les familles des maires d’Angers, en cinq tomes, Lachèse et Compagnie, Angers, 1893-1899.
François Laplanche, Le protestantisme en Anjou au temps de l’édit de Nantes, Archives d’Anjou, no 2, 1998, Association des Amis des archives de l’Anjou, Angers, p. 77-92.
François Lebrun :
Les hommes et la mort en Anjou aux 17e et 18e siècles, Essai de démographie et de psychologie historiques, Librairie Maloine-Mouton, Paris-La Haye, 1971, 562 p.
Le diocèse d’Angers, François Lebrun (dir.), Beauchesne, coll. « Histoire des diocèses de France », no 13, Paris, 1981, 307 p.
L’histoire vue de l’Anjou 987-1958, recueils de textes d’histoire régionale, en trois tomes, tome I 987-1789, Siraudeau et Cie, Angers, 1983, 179 p.
Arthur Le Moy, L’Anjou, Hachette, coll. « Histoire et géographie régionales de la France », Paris, 1924, 210 p.
Georges Letourneau :
Mémoires de Joseph Grandet, Histoire du séminaire d’Angers depuis sa fondation en 1659 jusqu’à son union avec Saint-Sulpice en 1695, en deux tomes, Germain et G. Grassin, Angers, 1893, LXXXVII-526 et 696 pages.
Histoire du séminaire d’Angers depuis son union avec Saint-Sulpice en 1695 jusqu’à nos jours, Germain et G. Grassin, Angers, 1895, XXIII-442 p.
Jean-Louis Ormières, Histoire de l’Anjou, Presses Universitaires de France, coll. « Que sais-je ? » no 934, Paris, 1998, 126 p.
Françoise Poirier-Coutansais, Cécile Souchon (dir.), Guide des archives de Maine-et-Loire, Angers, 1978, 426 p.
Célestin Port, Dictionnaire historique, géographique et biographique de Maine-et-Loire et de l’ancienne province d’Anjou, en quatre tomes, Édition revue et mise à jour par Jacques Levron et Pierre d’Herbécourt pour le tome I, Jacques Levron, Pierre d’Herbécourt, Robert Favreau et Cécile Souchon pour le tome II, André Sarazin et Pascal Tellier pour les tomes III et IV, H. Siraudeau et Cie, Angers, 1965, 1978, 1989 et 1996, 871, 491, 545 et 835 pages.
Charles Urseau, L’instruction primaire avant 1789 dans les paroisses du diocèse actuel d’Angers, Picard, Paris, 1890, 344 p. [1]
Anatole-Joseph Verrier, René Onillon, Glossaire étymologique et historique des patois et des parlers de l’Anjou, Slatkine Reprints, Genève, 1970, réimpression de l’édition d’Angers (en deux tomes) de 1908.