Minerve (latin : Minerva) est, dans la mythologie romaine, la déesse de la pensée élevée, de la sagesse, de l'intelligence, des métiers et de ceux qui les pratiquent ainsi que de la guerre comprise sous l'angle de la réflexion stratégique et du savoir-faire tactique (par opposition au courage brutal de Mars).
Lors du lectisterne de , elle a été assimilée à la déesse grecque Athéna, héritant d’une grande partie des mythes liés à celle-ci. Elle devient alors également la déesse de la sagesse, de la stratégie, de l'intelligence, de la pensée élevée, des lettres, des arts, de la musique et de l'industrie.
Étymologie
Notée Menerva ou Minerva, son nom se rattache probablement à la racine indo-européenne *men-, « pensée »[1]. Menrva, déesse de la mythologie étrusque, elle-même dérivée d'une déesse de la lune italique *Meneswā (« celle qui mesure »).
Culte
L'origine du culte de Minerve est obscure[1]. On lui a longtemps attribué une origine étrangère à Rome même s'il ne faut pas exclure qu'elle ait été indigène[2],[3]. Varron lui attribue une origine sabine[1]. La tradition romaine la fait venir de Faléries[1] où son culte est attesté par des inscriptions archaïques. Un temple romain, celui de la Minerva Capta (« Minerve prise ») est celui de la Minerve de Faléries[1]. Sa statue apparait pour la première fois lors du lectisterne de associée à Neptune[1], à l'instar du couple Athéna-Poséidon.
Selon Ovide, elle est fêtée par les artisans, les médecins et les enseignants. En ce sens, son culte se rapproche de la déesse celtique Brigit[4]. Elle est célébrée le lors des Quinquatries[1]. C'est aussi le jour où les élèves remercient leurs professeurs en leur offrant un cadeau, le minerval[1].
Son culte, surtout dans la classe des lettrés hellénisés, est progressivement rapproché de celui d'Athéna[1]. Cette équivalence a pu se fonder d'abord sur le patronage reconnu aux deux déesses sur les arts et métiers, mais suivant le processus ordinaire c'est à Athéna dans tous ses emplois qu'elle est bientôt assimilée[2]. Elle devient ainsi custos urbis, « gardienne de la cité ». Elle remplace progressivement Nerio, la compagne du dieu Mars dans la vieille religion romaine, par identification avec Athéna Niké (« victorieuse ») et Bellona[1]. Il faut néanmoins attendre le temps de Pompée pour la voir traitée cultuellement en Athéna Niké, bénéficiaire d'une fondation de manubiis, c'est-à-dire faite à partir du prix de vente d'un butin[2].
Le culte de Minerva Medica peut s'expliquer par la participation des médecins aux Quinquatries[1] ; la déesse est leur patronne.
Son culte se répand progressivement dans tout l'Empire romain, avec l'extension de celui-ci. On la retrouve à Nîmes, à Bath, Chichester, etc.[1]
Minerva Victrix
Minerva Victrix (« Minerve la victorieuse ») est une épithète de la déesse romaine Minerve, soulignant son rôle en tant que protectrice et déesse de la victoire. Minerve est l'une des principales divinités du panthéon romain, associée à la sagesse, à la guerre stratégique, aux arts et à l'artisanat.
Sous le titre de Minerva Victrix, elle était particulièrement vénérée comme déesse guerrière et protectrice des armées romaines. Ce rôle est notamment attesté par l’adoption de ce titre par la légion XX Valeria Victrix, une unité militaire romaine active en Grande-Bretagne, qui lui dédiait des autels et des temples.
La légion I Flavia Minervia, fondée par l'empereur Domitien en 82 ap. J.-C., est également étroitement liée à la déesse Minerve Victrix. Le nom Minervia dans le titre de la légion témoigne de la dévotion particulière de ses soldats envers Minerve en tant que protectrice victorieuse. La légion, stationnée notamment en Germanie, lui rendait régulièrement hommage à travers des inscriptions et des autels votifs. Plusieurs monuments découverts dans les camps de la légion portent la mention Minervae Victrici, soulignant l'importance du culte de Minerve pour cette unité militaire.
Le culte de Minerva Victrix s'inscrit dans une tradition plus large de la Rome antique consistant à invoquer des divinités tutélaires sous des épithètes reflétant leur fonction protectrice ou victorieuse. Des inscriptions, des monuments et des monnaies attestent de l'importance de ce culte, qui renforçait la dimension militaire et civique de la divinité.
Il y avait jusqu'en 207 un temple dédié à Minerve sur l'Aventin et un temple dédié à Minerva Capta (« Minerve captive ») sur la colline du Caelius. Cette chapelle contenait une statue de la déesse apportée de Faléries après la prise de la ville en [2].
Détail du temple de Minerve à Rome. Photo de James Anderson.
Par syncrétisme avec Athéna, Minerve est la fille de Jupiter et de la nympheMétis. Ayant entendu que si Métis avait un fils, le roi des dieux (Jupiter) serait détrôné : il l'avala, alors qu'elle était enceinte d'une fille. Quelques mois plus tard, Jupiter pris d'un violent mal de tête demanda à Vulcain de lui fendre le crâne ; Minerve sortie de la plaie du dieu du Ciel et de la Terre déjà ceinte de son armure, casquée et armée d'une lance.
Le symbole de Minerve est la chouette symbole de la sagesse et aussi de la virginité[3].
Dans la philosophie
La figure de Minerve apparaît dans la préface des Principes de la philosophie du droit, du philosophe allemand Hegel : « La chouette de Minerve prend son envol au crépuscule. » Allégorie de la philosophie, la chouette représente le « retard » pris par la conscience sur l'action[6]. Les progrès techniques, c'est-à-dire l'action, précèderaient toujours la conscience humaine. Ce décalage justifierait ainsi une « politique de civilisation », selon le philosophe Edgar Morin.
Postérité
La France sous les traits de Minerve, La Sagesse qui foule aux pieds l'Ignorance et qui couronne la Vertu guerrière, Sebastiano Ricci, 1718, musée du Louvre[7].