Catherine de Médicis rachète ces terrains situés entre l'enceinte de Charles V et l'enceinte des Fossés Jaunes[3]. À partir de 1564, elle y fait commencer la construction du palais des Tuileries, tout en débutant l'aménagement d'un jardin à l'italienne à l'ouest jusqu'au glacis de l'enceinte (actuelle place de la Concorde). Il est constitué de six allées dans le sens de la longueur et huit dans le sens de la largeur, qui délimitent des compartiments rectangulaires comprenant des plantations différentes (massifs d'arbres, quinconces, pelouses, parterres de fleurs, etc.). Une fontaine, une ménagerie et une grotte décorée par le célèbre céramiste Bernard Palissy décorent le jardin. Dans les années 1605-1625 sont ajoutées une orangerie et une magnanerie.
Restitution du parterre des Tuileries vu depuis la chambre à coucher de Louis XIV, XVIIe siècle.Départ du ballon des Tuileries (1783).
En 1664, Jean-Baptiste Colbert et Louis XIV ordonnent que le jardin soit entièrement redessiné par André Le Nôtre, qui s'était déjà illustré à Vaux-le-Vicomte. Le jardin s'agrandit vers l'ouest en incorporant le jardin Renard[3]. Le petit-fils de Pierre Le Nôtre, architecte de Catherine de Médicis et paysagiste, donne à celui-ci l'aspect qu'il va conserver, dans ses grandes lignes, jusqu'à nos jours : il perce dans l'axe du palais une allée centrale délimitée à l'est par un bassin rond, à l'ouest par un bassin octogonal ; il construit la terrasse du Bord de l'eau le long des quais des Tuileries et Aimé-Césaire et la terrasse des Feuillants, cette terrasse doit son nom à l'ordre religieux des Feuillants qui avaient rue Saint-Honoré un couvent proche, c'est le long de cette terrasse que sera tracée la future rue de Rivoli ; enfin, il bâtit sur le tracé de l'enceinte de Charles IX deux terrasses le long desquelles sera placée la future place de la Concorde, avec deux rampes en courbe permettant d'y accéder.
Craignant que le public n'abîme le jardin ainsi aménagé, Colbert veut en réserver l'accès à la famille royale. Mais Charles Perrault le convainc de la sagesse des Parisiens et de la nécessité que constitue pour eux l'accès à un jardin : on y « parlait d'affaires, de mariages et de toutes choses qui se traitent plus convenablement dans un jardin que dans une église, où il faudra[it] à l'avenir se donner rendez-vous. Je suis persuadé, poursuit-il, que les jardins des rois ne sont si grands et si spacieux qu'afin que tous les enfants puissent s'y promener ». Et le jardin reste accessible à tous, les entrées étant toutefois gardées. Les terrasses sont occupées par des cafés et des restaurants. Des chaises sont à disposition des promeneurs dans la grande allée contre deux sous[4].
De nombreuses statues de marbre viennent par ailleurs orner le jardin. En 1719, l'entrée principale est flanquée de deux statues d'Antoine Coysevox, représentant Mercure et la Renommée chevauchant un cheval ailé.
En 1783 a lieu la première ascension de personnes dans un ballon à gaz (Jacques Charles et les Marie-Noël Robert). Une plaque de l'Aéro-club de France, située aujourd'hui à droite en entrant dans le jardin, marque le souvenir de cet événement[5],[6].
Vue du jardin depuis le palais des Tuileries dans la seconde moitié du XVIIe siècle. Le jardin a déjà en grande partie son plan actuel, bien que les broderies des parterres aient aujourd'hui disparu. L'avenue des Champs-Élysées, visible en arrière-plan, est alors une perspective tracée dans la campagne pour agrémenter la vue depuis le jardin et le palais.
Sous la Révolution, le jardin est le témoin des grands événements dont le palais est lui-même le théâtre, notamment la prise des Tuileries le . Le bassin rond est utilisé pour la cérémonie de l'Être suprême le . On y place des effigies représentant l'Athéisme entouré de l'Ambition, de l'Égoïsme, de la Discorde et de la Fausse Simplicité. Maximilien de Robespierre y met le feu, dans une apothéose de cris et d'applaudissements. Le cortège se dirige ensuite vers le Champ-de-Mars. Le , ce même bassin accueille le cercueil de Jean-Jacques Rousseau, drapé d'un drap parsemé d'étoiles (exhumé d'Ermenonville pour être porté au Panthéon).
La rue de Rivoli est tracée au début du XIXe siècle entre la rue de Rohan et la rue Saint-Florentin à l'emplacement notamment de l'impasse du Manège et des terrains occupés par les Dames-de-l'Assomption[7]. Le jardin s'agrandit alors au nord-ouest. Lors de l'aménagement du quai des Tuileries, un mur d'appui est bâti le long de la terrasse du Bord de l'eau, avec des pierres extraites des carrières de Châtillon[8].
Aux angles occidentaux du jardin, Napoléon III fait construire deux bâtiments identiques :
En 1870-1871, lors du siège de Paris, on fabrique des ballons montés et certains en décollent. La fabrication quitte les Tuileries pour la gare de l'Est après un bombardement prussien. Le palais des Tuileries est détruit par un incendie durant la Commune de Paris en 1871. Le tableau de Stanislas Lépine a été peint avant la démolition des ruines du Palais, réalisée entre décembre 1882 et septembre 1883. Les ruines sont visibles en arrière plan[9].
En 1877, la rue des Tuileries, l'actuelle avenue du Général-Lemonnier, est ouverte à l'emplacement de la terrasse de l'ancien palais des Tuilerie. En 1883, les ruines des Tuileries sont rasées, ce qui rend actuellement très difficile la compréhension des lignes et de l'esthétique du jardin des Tuileries pour les visiteurs non avertis de la présence de l'ancien palais, le jardin était en effet entièrement conçu spécialement comme une mise en scène théâtrale pour mettre en valeur les volumes spécifiques du palais[réf. nécessaire]. Le jardin du Carrousel est aménagé en partie à l'emplacement du palais disparu. De ce fait, le jardin des Tuileries est désormais visible depuis l'avant de la grande cour du palais du Louvre. L'avenue du Général-Lemonnier ayant été partiellement enterrée, les deux jardins sont dans la continuité l'un de l'autre.
Le salon de l'automobile de Paris 1898 et celui de l'année suivante s'y déroulent. La première édition est un vrai succès, accueillant 140 000 visiteurs[11].
Pendant la Seconde Guerre mondiale, une partie du jardin est transformée en potager à cause du manque de ravitaillement durant l'Occupation. Le , le général von Choltitz, commandant du Groß-Paris y reçoit un ultimatum du colonel Pierre Billotte de la 2e DB et répond : « Je n'accepte pas les ultimatums. » Lors des combats qui suivent, le capitaine Branet s'empare de l'hôtel Meurice, rue de Rivoli, quartier-général des forces d'occupation allemande ; le capitaine Julien emprunte la rue du Faubourg-Saint-Honoré pour atteindre le siège de la Kommandantur, place de l'Opéra et de son côté le lieutenant Bricard nettoie le jardin des Tuileries. Les dix plaques commémoratives apposées le long du jardin à l'angle de la rue de Rivoli et de la place de la Concorde ne rendent pas complètement compte de l'intensité des combats et du nombre de victimes.
En 1995, suite à une consultation internationale organisée par Jean-Paul Pigeat, un chantier de rénovation du jardin est confié à l'architecte François Roubaud et aux paysagistes Louis Benech et Pascal Cribier. Un suivant se poursuit jusque 2026 (restauration des pierres, plantation d'arbres)[14],[15].
Cassandre se met sous la protection de Pallas d'Aimé Millet (marbre, 1877).
Iconographie
Un tableau d'Eugène Lami représentant l'entrée de la duchesse d'Orléans dans le jardin des Tuileries le figure à la vente aux enchères de l'étude Tessier, Sarrou et associés à Paris-Drouot le (reprod. coul. dans La Gazette Drouot, no 23, , p. 151).
De nombreuses chaises sont mises gratuitement à disposition des promeneurs dans tout le parc. Près du jardin du Carrousel, se trouvent le deuxième bassin du jardin et son loueur de bateaux à voile miniatures.
D'immenses tentes sont plantées deux fois par an dans le jardin dans le cadre de la semaine de la mode parisienne, ces tentes étant destinées à accueillir des défilés et le backstage (maquillage, coiffure, habillage…).
Depuis 2005, la gestion du jardin des Tuileries est confiée au musée du Louvre, qui assure la mise en valeur. Il est entretenu par la sous-direction chargée des jardins, de la direction Patrimoine architectural et jardins du musée du Louvre et son équipe constituée de dix-sept jardiniers d’art, une conservatrice du patrimoine, une ingénieure du paysage et deux chefs de travaux d’art[20].
Les activités commerciales sont encadrées par le service des concessions de la Direction des relations extérieures du musée, qui délivrent des conventions d'occupation temporaire du domaine. Ces évènements ont lieu sur l'esplanade des Feuillants, une bande sablée qui borde la rue de Rivoli[21].
Katherine Librowicz (1912-1991), Kermesse aux étoiles dans le jardin des Tuileries, printemps 1955. Les spectateurs devant un stand, 1955, aquarelle, Paris, musée Carnavalet[23].
Attribué à Paul de Castro, Le Jardin des Tuileries en automne (1921), localisation inconnue.
À la télévision
Des scènes de la saison 2 de la série télévisée Baron noir (2018) y sont tournées.
À la fin de l'épisode 6 de la saison 4 de la série télévisée Dix pour cent (2020), une scène est tournée devant le bassin nord-est du jardin, près de la statue du tigre terrassant un crocodile (cf. partie suivante).
Les statues mises en place antérieurement à la Régence (à l'initiative de Catherine de Médicis, d'Henri IV ou de Louis XIV), ne sont plus visibles aujourd'hui mais on peut toutefois rencontrer des cas de réalisations antérieures à la Régence (mais non de mise en place), en particulier à la suite de transferts provenant des jardins de Versailles et de Marly[24].
Les originaux de certaines statues ont été généralement remplacés par des moulages, la plupart du temps pour préserver des œuvres qui sont alors rapatriées sous zone couverte (c'est le cas du Lion au serpent d'Antoine-Louis Barye, remplacé par un moulage dès 1911[25]), quelquefois pour permettre un rapatriement dans les musées ou parcs où ils étaient auparavant : c'est le cas par exemple de l'Hercule Farnèse et de la Flore Farnèse repartis au parc de Sceaux (à l'orangerie pour ce qui est des originaux). À la mi-2018, on compte 27 moulages sur 147 œuvres présentes. Cependant, certaines statues, initialement installées dans le jardin n'ont pas été remplacées lors de leur déplacement : c'est le cas du Spartacus brisant ses chaînes, de Denis Foyatier, installé en 1831 et transféré au musée du Louvre en 1877[26],[24].
En 1910, pour la première fois, deux statues marquent l'entrée de la politique dans le jardin avec le Monument à Jules Ferry de Gustave Michel et le Monument à Waldeck-Rousseau de Laurent Marqueste. C'est à cette même période qu'est installé le Monument du conteur Charles Perrault (1908) de Gabriel Pech, représentant le buste de Perrault entouré d'une ronde d'enfants[24].
Entre 1894 et 1933 y est installée la statue Quand même !. Deux arcades vestiges du palais des Tuileries, composées d'éléments d'origine et d'autres sculptés à l'identique, ont été installées dans le jardin près du musée du Jeu de Paume, et retirées en 1993 pour restauration ; une seule a été réinstallée en 2011[27].
Anne Allimant-Verdillon et Alexandre Gady, Le Jardin des Tuileries d'André Le Nôtre. Un chef-d'œuvre pour le Roi-Soleil, Somogy, 2013, 142 p. (ISBN978-2757206324), ill.
Antoine Boulant, Les Tuileries, château des rois, palais des révolutions, Tallandier, 2016, 336 p. (ISBN979-10-210-1878-5)
Geneviève Bresc-Bautier, Denis Caget et Emmanuel Jacquin, Jardins du Carrousel et des Tuileries, Paris, Réunion des musées nationaux, Caisse nationale des monuments historiques et des sites, 1996, 163 p. (ISBN2-7118-3391-7 et 2-85822-165-0).
Geneviève Bresc-Bautier et Anne Pingeot, Sculptures des jardins du Louvre, du Carrousel et des Tuileries, Paris, RMN, notes et documents des Musées de France n°12, 1986, deux volumes.
Guillaume Fonkenell, Le Palais des Tuileries, coédition Honoré Clair/Cité de l'architecture & du patrimoine, 2010, 223 p. (ISBN978-2918371045).
Jacques Hillairet, Le palais royal et impérial des Tuileries et son jardin, éditions de Minuit, 1965.
Emmanuel Jacquin, « Les Tuileries de Catherine de Médicis », dans Marie-Noëlle Baudouin-Matuszek (dir.), Paris et Catherine de Médicis, Paris, Délégation à l'action artistique de la Ville de Paris, , 190 p., 29 cm (ISBN2-905118-16-4), p. 87-105.