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De Mi caja de notas

(Page créée avec « Mardi 21 janvier 2020 S<sup>te</sup> Agnès »)
 
 
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> Pourquoi prendre le temps d’être en retard ?
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Réhabiliter le retard pour retrouver le temps de vivre face aux injonctions actuelles à la performance et à la rentabilité. Hélène L’Heuillet, psychanalyste et maître de conférence en philosophie à l’Université Paris-Sorbonne, nous en parle dans son "Eloge du retard" (Albin Michel, Janvier 2020).
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Le retard sera-t-il salvateur de nos vies ? Alors que nous pensons manquer de temps, notre plus grande crainte est d’en avoir trop. C’est le paradoxe que souligne Hélène L’Heuillet, psychanalyste et maître de conférence en philosophie à l’Université Paris-Sorbonne, dans _Éloge du retard_ (Albin Michel, Janvier 2020). Un essai en quatre temps pour autant de déclinaisons d’une angoisse qui nous hante et rythme notre vie : être en retard.
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> La grève nous montre à quel point nos emplois du temps sont chargés et nous a permis de reconquérir un temps autre. Elle nous a rendus disponibles à un autre temps. (Hélène L'Heuillet)
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A travers l’analyse du rapport au travail, au sommeil, mais aussi à la tristesse et la mélancolie, elle nous invite à résister à la vitesse et à l’urgence pour prendre le temps de vivre et donc d’exister. Le retard, écrit-elle, a notamment à voir avec la liberté, car il rend souverain et un remède pour le vivre bien, nous invitant à décélérer. Et c’est précisément dans le retard qu’au moment où tout devient éphémère, on peut recommencer à sentir la durée.  Or on ne peut pas saisir ni encadrer le retard : s’il est intégré dans une marge temporelle, il n’est plus retard.
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> Bien souvent, le retard est l’apanage des puissants. Comment teste-t-on la docilité de l’autre ? En le faisant attendre. — Hélène L'Heuillet
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Néanmoins, faire bon usage du retard, précise-t-elle, ne signifie pas ralentir ou revenir à la lenteur. Il ne s’agit pas non plus de faire un éloge de la patience dans celui du retard, mais d’une hâte en lien avec les échéances essentielles. La hantise du retard reposerait sur une conception conservatrice du progrès assimilé à l’ascension d’un escalier : ainsi [[Claude Lévi-Strauss]] la considère-t-il comme au principe de l’ethnocentrisme, étant désignés comme "retardés" ceux qui ne savent pas suivre le rythme. Surtout, le retard ne peut être érigé en système, car il perd alors sa fonction subversive. Il doit surprendre même celui qui se met en retard.
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> Le vrai retard, c’est celui qui n’est pas calculé. Celui qui nous surprend nous-même.  — Hélène L'Heuillet
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À ÉCOUTER AUSSI
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Extraits sonores :
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* [[Alice au Pays Des Merveilles]] (Clyde Geronimi, Wilfred Jackson, Hamilton Luske, 1951)
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* [[Cuisine et Dépendances]] (Philippe Muyl, 1993)
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* La machine à faire dormir (ORTF JT 20H 27/01/1963)
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* [[Georges Moustaki]] sur Le droit à la paresse de Paul Lafargue ("Aujourd'hui la vie" / France 2 /  1982)
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* Hartmut Rosa sur l'"Accélération"

Version actuelle datée du 22 janvier 2020 à 01:17

Mardi 21 janvier 2020

Ste Agnès

📚 Éloge du retard

2020-01-17 Olivia Gesbert : Pourquoi prendre le temps d’être en retard ?


> Pourquoi prendre le temps d’être en retard ?

Réhabiliter le retard pour retrouver le temps de vivre face aux injonctions actuelles à la performance et à la rentabilité. Hélène L’Heuillet, psychanalyste et maître de conférence en philosophie à l’Université Paris-Sorbonne, nous en parle dans son "Eloge du retard" (Albin Michel, Janvier 2020).

Le retard sera-t-il salvateur de nos vies ? Alors que nous pensons manquer de temps, notre plus grande crainte est d’en avoir trop. C’est le paradoxe que souligne Hélène L’Heuillet, psychanalyste et maître de conférence en philosophie à l’Université Paris-Sorbonne, dans _Éloge du retard_ (Albin Michel, Janvier 2020). Un essai en quatre temps pour autant de déclinaisons d’une angoisse qui nous hante et rythme notre vie : être en retard.

> La grève nous montre à quel point nos emplois du temps sont chargés et nous a permis de reconquérir un temps autre. Elle nous a rendus disponibles à un autre temps. (Hélène L'Heuillet)

A travers l’analyse du rapport au travail, au sommeil, mais aussi à la tristesse et la mélancolie, elle nous invite à résister à la vitesse et à l’urgence pour prendre le temps de vivre et donc d’exister. Le retard, écrit-elle, a notamment à voir avec la liberté, car il rend souverain et un remède pour le vivre bien, nous invitant à décélérer. Et c’est précisément dans le retard qu’au moment où tout devient éphémère, on peut recommencer à sentir la durée. Or on ne peut pas saisir ni encadrer le retard : s’il est intégré dans une marge temporelle, il n’est plus retard.

> Bien souvent, le retard est l’apanage des puissants. Comment teste-t-on la docilité de l’autre ? En le faisant attendre. — Hélène L'Heuillet

Néanmoins, faire bon usage du retard, précise-t-elle, ne signifie pas ralentir ou revenir à la lenteur. Il ne s’agit pas non plus de faire un éloge de la patience dans celui du retard, mais d’une hâte en lien avec les échéances essentielles. La hantise du retard reposerait sur une conception conservatrice du progrès assimilé à l’ascension d’un escalier : ainsi Claude Lévi-Strauss la considère-t-il comme au principe de l’ethnocentrisme, étant désignés comme "retardés" ceux qui ne savent pas suivre le rythme. Surtout, le retard ne peut être érigé en système, car il perd alors sa fonction subversive. Il doit surprendre même celui qui se met en retard.

> Le vrai retard, c’est celui qui n’est pas calculé. Celui qui nous surprend nous-même. — Hélène L'Heuillet

À ÉCOUTER AUSSI Extraits sonores :